PART II [LE PROCEDE DE LA RENAISSANCE ]
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(Version Marguerite La Fuente)



10. 1  
La protection contre les furies tourmenteuses
10. 2  
"Ô fils noble, bien qu'on ne le veuille pas, étant poursuivi par les furies tourmenteuses karmiques (336), on se sent forcé, involontairement, d'aller de l'avant. Des furies tourmenteuses devant soi, des "coupeurs de la vie" en avant-garde vous entraînant, l'obscurité, les tornades karmiques, des bruits, de la neige, de la pluie, des orages terrifiants, des bourrasques de vent glacé se manifestent, la pensée de les fuir grandira.
10. 3  
Alors, cherchant un refuge par peur (on voit) les visions décrites de : grandes demeures, cavernes rocheuses, excavations, jungles et fleurs de lotus qui se referment (lorsqu'on y pénètre) ; et l'on échappe aux tourments, en se cachant dans (l'une de ces places) et l'on craint d'en sortir, en pensant : "Il ne serait pas bon de sortir maintenant". Redoutant de partir, on se sent grandement attiré par son lieu de refuge (qui est la matrice). Craignant, en sortant, de retrouver l'horreur et la terreur du Bardo, effrayé de les rencontrer encore, si pourtant l'on se cache (dans la place ou dans la matrice choisie) on assumera un corps misérable et diverses souffrances variées.
10. 4  
Cette (condition) indique que de mauvais esprits et rākshasas (démons) s'interposent (337). Il est pour ce moment un enseignement profond. Écoute et prête attention.
10. 5  
A ce moment – quand les furies tourmenteuses te poursuivront et que l'horreur et la terreur viendront – instantanément (évoque la vision) de l'Heruka Suprême ou de Hayagriva ou de Vajra-Pāni (338) ou (n'importe quelle) autre déité tutélaire, si tu en as une, vision de forme parfaite, large de corps, les membres massifs, irritée, d'apparence terrifiante, capable de réduire en poussière tous les esprits malfaisants. Aie cette vision instantanée. Ses vagues de dons, le pouvoir de sa grâce te sépareront des furies tourmenteuses et tu obtiendras ainsi de pouvoir choisir le sein où tu renaîtras. Ceci est l'art vital de ce très profond enseignement, donc, porte-le bien dans ton esprit.
10. 6  
Ô fils noble, le Dhyani et les autres déités sont nés du pouvoir de Samādhi (méditation). Les pretas (esprits ou ombres malheureux), les esprits méchants de certains ordres sont ceux qui, changeant leur sentiment (ou attitude mentale) alors qu'ils sont dans l'État intermédiaire, prennent cette forme, la gardent ensuite et deviennent prelas, mauvais esprits, rākshasas en possédant le pouvoir des changements de formes. Tous les pretas qui existent dans l'espace, qui traversent le ciel et les (80.000) espèces d'esprits nuisibles sont devenus ce qu'ils sont en changeant leurs sentiments dans le corps mental (du plan du Bardo) (339).
10. 7  
A ce moment, si l'on peut se souvenir de (l'enseignement) du Grand Symbole sur le Vide, ce serait le mieux. Si l'on n'est pas entraîné à cela, alors, dressez les pouvoirs (mentaux) (340) à regarder toutes choses comme illusion (ou maya). Même si cela est impossible, ne vous laissez attirer par rien. En méditant sur la Déité Tutélaire, le Grand Compatissant, on obtiendra l'état de Bouddha dans le SamboghaKāya."
10. 8  
Notes

(336) Texte : Gshed-ma (pron. : shed-ma), tourmenteurs ou "ceux qui prennent la vie", employé ici pour désigner les furies tourmenteuses.
(337) Intervenant pour empêcher la naissance ou une bonne naissance.
(338) Chacune de ces déités, qui paraissent dans le Chönyid Bardo, les 8ème, 6ème et 5ème jours, est considérée comme exorciste très puissante des mauvais esprits.
(339) Car ils sont arrivés au faux concept que l'État intermédiaire est un état d'existence désirable et fixe. Tous ceux qui y demeurent (esprits, pretas, démons, être humains défunts), s'ils s'habituent au Bardo, retardent leur évolution normale. Suivant les Lāmas les plus éclairés, quand un esprit est évoqué, comme dans les réunions spirites communes aujourd'hui dans l'Ouest par le contact avec le monde et la croyance traditionnelle animique prévalente sur la survie, cet esprit croit possible un progrès dans le Bardo et il ne fait aucun effort pour en sortir. L'esprit ainsi appelé décrit le Bardo (qui est avant tout un royaume d'illusion) dans laquelle il se trouve, d'une façon plus ou moins conforme à ce qu'il supposait être l'au-delà quand il avait un corps de chair. Car ainsi que dans le monde humain, l'être répète en rêve les expériences de l'état de veille, l'habitant du Bardo répète en hallucinations karmiques le contenu de sa conscience du monde humain. Ses visions symboliques, ainsi que le Bardo Thödol l'affirme sans cesse, ne sont que des réflexes psychiques des formespensées emportées de la vie terrestre, comme des dépôts du mental ou des semences de karma. Ce qui explique pourquoi il est très exceptionnel qu'un esprit évoqué ait quelque philosophie rationnelle à offrir concernant la place où il se trouve. Ces esprits sont plutôt le simple jouet du karma manquant de cohérence mentale et de stabilité de la personnalité, et, le plus souvent, ce sont des esprits dénués de sens, des "coquilles" psychiques qui ont été rejetées avec le principe conscient et qui, venant en rapport avec un médium humain sont galvanisés en une sorte de vie automatique. Il est vrai que l'évocation des esprits est pratiquée d'une certaine façon au Tibet, en Mongolie et en Chine par les Lāmas qui forment une sorte de classe de prêtres-oracles consultés sur des problèmes importants, même politiques, et par le Dalai-Lama lui-même. Mais les esprits appelés sont ceux de déités tutélaires d'ordre inférieur appelés "ceux qui exécutent les ordres" (tib. : bkah-dod pron. : kadöt, voulant dire "celui qui attend l'ordre") et jamais on n'appelle l'esprit d'hommes ou de femmes morts récemment. Certains de ces bkah-dods sont, suivants les Tibétains, les esprits de Lāmas ou dévots qui n'ont pas atteint (souvent à cause de la pratique de la magie noire) l'illumination spirituelle dans le monde humain, ou bien comme il vient d'être dit, se sont laissés détourner du chemin normal de la progression. Dans bien des cas ils sont devenus des esprits démoniaques et malins dont le progrès a été arrêté, non pour avoir été évoqué par des médiums peu après leur mort, mais naturellement à cause d'un très mauvais karma. De tels bkah-dods, se présentant avec l'esprit des morts ordinaires, sont considéréscomme des démons obsédants pouvant faire beaucoup de mal mentalement et psychiquement aux médiums non entrainés et à leurs clients, car ils peuvent être cause de folie ou irresponsabilité morale. Pour cette raison les Lāmas disent que les recherches psychiques doivent être dirigées par des maitres en sciences magiques ou occultes et non à la légère par la multitude de gens sans direction.
Au Sikkim, une nécromancie, précisément semblable à celle de l'Occident, est pratiquée depuis des siècles. Les Lepchas, desçendants de la race primitive du Sikkim, qui forment encore une grande part de la population rurale, sont aussi animistes dans leurs cultes que les Indiens d'Amérique, et c'est surtout par leur influence que s'est répandue l'évocation des morts chez les Bouddhistes, dont beaucoup sont de sang mélangé tibétain et lepcha. Ces évocations sont pratiquées de même dans le Bhutan bouddhiste malgré l'opposition des Lāmas dont les efforts sont plutôt inopérants. On dit que le temps perdu pour un esprit retenu dans le Bardo est de (500) à (1000) ans et parfois pendant des âges. Tant que le défunt ne peut échapper au Bardo, il lui est impossible de passer dans un paradis ou rentrer dans le monde humain. Il finira toujours cependant par entrer dans un germe et son Bardo se terminera.
(340) Texte : Rtsal (pron. : Sal) : "pouvoirs" ; ailleurs dans le texte : Dvang-po (pron. : Wang-po), étant rendu par "facultés".


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Chapitre 10
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