PART II [LE PROCEDE DE LA RENAISSANCE ]
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(Version Marguerite La Fuente)



14. 1  
CONCLUSION GENERALE
14. 2  
Par la vertu de ces lectures faites correctement, les dévots (ou yogis) qui sont avancés en entendement peuvent faire le meilleur usage du Transfert (359) au moment de la mort. Ils n'ont pas à traverser l'État intermédiaire, mais s'en iront par le "Grand Chemin Droit Ascendant" (360). D'autres un peu moins entraînés (en choses spirituelles), reconnaissant la Claire Lumière dans le Chönyid Bardo au moment de la mort, iront par la (voie) montante. Ceux qui sont au-dessous de ceux-ci seront libérés – en accordante avec leurs capacités particulières et leurs connexions karmiques – lorsque l'une ou l'autre des Déités Paisibles et Irritées brillera sur eux, durant les (deux) semaines du Chönyid Bardo.
14. 3  
Il est bien des points où l'on peut obtenir la libération si l'on arrive à la reconnaissance à l'un ou l'autre d'entre eux (361). Mais ceux dont le bon karma est faible, ceux dont la masse d'obscurcissements est grande (à cause) de leurs mauvaises actions, ont à errer de plus en plus bas jusqu'au Sidpa Bardo. Pourtant, là encore, ainsi que les degrés d'une échelle, il y a bien des sortes de confrontations (ou rappels) ; la libération devrait être obtenue en reconnaissant l'un ou l'autre degré. Mais ceux dont la relation karmique est la plus faible, parce qu'ils ne savent pas reconnaître, tombent sous l'influence de l'horreur et la terreur. (Pour eux) il est divers degrés d'enseignement pour clore la porte des matrices et pour choisir la porte d'une d'elles. Par l'un ou l'autre de ces enseignements, ils auraient dû saisir la méthode de vision et (en appeler) aux – vertus illimitées (supérieures) pour exalter leur propre condition. Même le plus bas d'entre eux, relevant de l'ordre des brutes, est capable – en vertu de l'application du Refuge – de se détourner de l'entrée dans la misère. (Obtenant) le grand (bienfait) d'un corps humain (362) libre et parfaitement doué, il pourra dans la prochaine naissance rencontrer un guru qui est un ami vertueux et obtenir les v œux (sauveurs).
14. 4  
Si cette Doctrine est entendue (quand on est) dans le Sidpa Bardo, ce sera comme la réunion des bonnes actions, ressemblant ainsi à une-auge placée sous la fente d'un drain cassé ; tel est l'enseignement (363).
14. 5  
Ceux qui ont un lourd et mauvais karma ne peuvent pas manquer d'être libérés en écoutant cette Doctrine (et en la reconnaissant). S'il est demandé pourquoi ? C'est parce qu'à ce moment toutes les Déités Paisibles et Irritées sont présentes pour recevoir (le mort) et que les Mārās et les Interrupteurs viennent aussi (le) recevoir avec elles. Le simple entendement de cette Doctrine dirige les propres pensées du mort et la libération est obtenue, car il n'est plus dépendant d'un corps de chair et de sang mais il est un corps mental qui est (aisément) affecté. Quelle que soit la distance où l'on soit en train d'errer dans le Bardo, si l'on est appelé, on entend l'appel et on vient, car on possède le sens atténué de la perception et la prescience supra-normales. Étant capable de se souvenir et de comprendre instantanément, l'esprit est capable d'être changé (ou influencé). L'(enseignement) est donc ici d'une grande utilité. Il est semblable au mécanisme d'une catapulte (364). Il est semblable au maniement d'une énorme pièce de bois (ou poutre) que cent hommes ne peuvent porter, mais qui, étant mise à flotter sur l'eau, peut être aisément dirigée où l'on veut en un moment (365). Il est semblable, cet enseignement, au contrôle de la bouche du cheval par les brides (366).
14. 6  
Donc, vous rendant près (du corps de celui) qui vient de quitter la vie, si le corps est présent, imprimez fortement ceci (sur l'esprit du défunt), répétez-le encore et encore jusqu'à ce que du sang et une sécrétion d'eau jaunâtre commencent à sortir des narines. A ce moment, le corps ne doit pas être dérangé. Les règles que l'on doit observer pour que (l'impression soit efficace) sont celles-ci : ne tuer aucun animal pour le compte du défunt (367) ; ne pas laisser les proches pleurer et gémir près du corps inanimé (368) ; engager (la famille) à accomplir des actions vertueuses autant qu'il est possible (369).
14. 7  
Cette grande Doctrine du Bardo Thödol, aussi bien que d'autres textes religieux, peut être exposée de diverses façons (au mort ou au mourant). Si cette Doctrine est jointe à la fin du Guide (370) et récitée (en entier avec le Guide), elle devient très efficace. D'autre part, elle devrait être récitée aussi souvent que possible (371). Ces mots et leurs significations doivent être présents à la mémoire (de tous) ; et lorsque la mort devient inévitable et que les symptômes en sont reconnus – si la force le permet – on doit se les réciter à soi-même et réfléchir sur leur sens. Si l'on est trop faible, alors qu'un ami lise ce livre pour l'imprimer vivement dans l'esprit. La force de libération ne fait alors aucun doute.
14. 8  
Cette Doctrine est celle qui libère par la vue, sans qu'il y ait besoin de méditation ou de Sādhanā (372). Cet Enseignement Profond libère en étant entendu ou en étant vu. Cet Enseignement Profond libère ceux qui ont un très mauvais karma par le Sentier Secret. On ne doit pas oublier sa signification et ses paroles, alors même que l'on serait poursuivi par sept chiens (373).
14. 9  
Par cet enseignement choisi, on obtient l'État de Bouddha au moment de la mort. Même si les Bouddhas des Trois Temps (passé, présent, futur) la cherchaient ils ne pourraient trouver une Doctrine dépassant celle-ci.
14. 10  
Ainsi est achevée "l'essence du cœur de la Profonde Doctrine du Bardo", appelée le Bardo Thödol, celle qui libère les êtres incarnés. (Ici finit le livre de la Mort tibétain.)
14. 11  
Notes

(359) Voir introduction du Bardo Thödol.
(360) Voir partie I du Bardo Thödol.
(361) Ou passages étroits ou embuscades.
(362) Texte : dal-hbyor-phun-sum-tshogs pahi-mi-lüs (pron. : tal-jor-phün-sum-taho-pa-mi-lu) : "un corps humain libre et parfaitement doué". Libre des huit servitudes. 1° : la ronde indéfiniment recommencée des plaisirs liés à l'existence des dévas ; 2° : l'état de guerre incessant lié à l'existence des asuras ; 3° : l'absence d'aide et la servitude liées aux conditions dirigeant le monde brute ; 4° : les tourments de la faim et de la soif liés avec l'existence des pretas ; 5° : les extrêmes de chaleur et de froid liés à l'existence de l'enfer ; 6° : l'irréligion ou la religion pervertie dans l'existence de certaines races de l'humanité ; 7° et 8° : les épreuves physiques et autres supportées dans certaines conditions d'incarnation humaine. Pour obtenir un corps humain parfaitement doué, il faut posséder naturellement : foi, persévérance, intelligence, sincérité, humilité comme un être religieux, il faut être né au moment où la religion est prévalente (c'est-à-dire au moment où un Illuminé est incarné ou que son enseignement est la force dirigeante du monde) et il faut rencontrer à ce moment un guru développé spirituellement.
(363) Si un drain est cassé l'écoulement de l'eau est interrompu. L'enseignement a le même effet que la réparation du drain par l'insertion d'une auge qui rétablit le courant malgré la cassure (qui symbolise la cassure de la conscience causée par la mort). Donc par le mérite des bonnes actions faites par le mort durant sa vie humaine il sera porté en avant et la continuité sera rétablie.
(364) Une catapulte permet de diriger une grosse pierre dans une direction définie, ainsi cette doctrine permet au défunt de se diriger vers le but de la Libération.
(365) Comme l'eau rend possible le déplacement de la masse de bois, ainsi la doctrine rend possible pour le défunt l'accès aux places d'existence appropriées et même à l'existence de Bouddha.
(366) Comme le cheval est dirigé par la bride, le défunt est dirigé ou ramené par la doctrine vers la progression.
(367) Ceci ne vise pas les sacrifices d'animaux pour le mort, mais l'habitude non bouddhique de tuer des animaux pour nourrir les Lāmas et les invités pendant les funérailles. Malheureusement cette défense est souvent transgressée, et si l'on use du subterfuge de ne pas tuer les animaux sur place mais de les faire apporter déjà tués, c'est une observance de la lettre mais non de l'esprit du précepte bouddhique de ne pas tuer.
(368) Les gémissements et lamentations sont coutumiers parmi les Tibétains et les peuples de l'Himalaya, comme parmi ceux de l'Inde et de l'Égypte depuis des temps immémoriaux. Le Bouddhisme comme l'Islamisme les désapprouvent.
(369) Des oeuvres comme nourrir les Lāmas et les pauvres, donner des aumônes, faire don de textes religieux ou de statues à des monastères, faire des dotations aux monastères, si le défunt était fortuné.
(370) Voir note 60.
(371) Litt. soit toujours récité.
(372) Texte : Bsgrub (pron. : Dub), sans. : Sādhanā, "dévotion parfaite" qui demande ordinairement l'accomplissement très attentif d'un rituel technique plus ou moins compliqué.
(373) Les chiens méchants sont nombreux au Tibet et les voyageurs portent un talisman spécial pour s'en protéger. Cette allusion aux sept chiens furieux est purement tibétaine et semble une preuve de plus que le Bardo Thödol prit forme au Tibet même en empruntant à la mythologie indienne et au système philosophique de Yoga.


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