Asclepius
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8 Verses | Page 1 / 1
(Version Louis Ménard)



10. 1  
Il nous faut parler maintenant de l'immortel et du mortel. La multitude, ignorante de la raison des choses, est troublée par l'attente et la crainte de la mort. La mort arrive par la dissolution du corps, fatigué de son travail. Quand le nombre qui maintient l'unité est complet, car le lien du corps est un nombre, le corps meurt. Cela arrive quand il ne peut plus supporter les charges de la vie. Voilà donc ce qu'est la mort, la dissolution du corps et la fin des sensations corporelles.[9] Il est superflu de s'en inquiéter. Mais il est une autre loi nécessaire que méprise l'ignorance ou l'incrédulité humaine.
10. 2  
ASCLÈPIOS : Quelle est cette loi qu'on ignore ou à laquelle on ne croit pas?
10. 3  
HERMÈS : Écoute, ô Asclèpios. Quand Pâme s'est séparée du corps, elle passe, pour être jugée selon ses mérites, sous la puissance suprême du démon ; s'il la trouve pieuse et juste, il lui permet de demeurer dans le séjour qui lui appartient; mais s'il la voit souillée de taches et de vices, il la précipite de haut en bas et la livre aux tempêtes et aux tourbillons contraires de l'air, du feu et de l'eau. Sans cesse agitée entre le ciel et la terre par les flots du monde, elle sera entraînée de côté et d'autre dans d'éternelles peines;[10] son immortalité donne une éternelle durée au jugement porté contre elle. Tu comprends combien nous devons craindre et redouter un sort pareil. Ceux qui refusent d'y croire seront forcément convaincus alors, non par des paroles, mais par des exemples, non par des menaces, mais par les peines qu'ils souffriront.
10. 4  
Les fautes des hommes, ô Trismégiste, ne sont donc pas punies seulement par la loi humaine?
10. 5  
Ο Asclèpios, tout ce qui est terrestre est mortel. Ceux qui vivent selon la condition corporelle, et qui manquent pendant la vie aux lois imposées à cette condition, sont soumis après la mort à des châtiments d'autant plus sévères que plusieurs des fautes qu'ils ont commises ont pu rester cachées; la prescience universelle de Dieu rendra la punition proportionnelle aux fautes.
10. 6  
ASCLÈPIOS : Quels sont ceux qui méritent les plus grandes peines, ô Trismégiste?
10. 7  
HERMÈS : Ceux qui, condamnés par les lois humaines, périssent de mort violente, en sorte qu'ils semblent, non pas avoir payé leur dette à la nature, mais avoir reçu le prix de leurs actes. L'homme juste, au contraire, trouve dans la religion et la piété un grand secours, et Dieu le garantit contre tous les maux. Le père et seigneur de toutes choses, qui seul est tout, se manifeste volontiers à tous; non qu'il montre en quel lieu il réside, ni quelle est sa qualité ou sa grandeur, mais il éclaire l'homme par la seule intelligence, qui dissipe les ténèbres de l’erreur et découvre les lumières de la vérité. Par elle l'homme s'unit à l'intelligence divine; en aspirant à elle, il se délivre de la partie mortelle de sa nature et conçoit l'espérance de l'immortalité. Telle est la différence des bons et des méchants. Celui qu'éclairent la piété, la religion, la sagesse, le culte et la vénération de Dieu, voit, comme avec les yeux, la vraie raison des choses, et, par la confiance de sa foi, l'emporte autant sur les autres hommes que le soleil sur les autres astres du ciel. Car si le soleil illumine le reste des étoiles, ce n'est pas tant par sa grandeur et sa puissance que par sa divinité et sa sainteté. Il faut voir en lui, ô Asclèpios, un second Dieu qui gouverne le reste du monde et en éclaire tous les habitants, animés ou inanimés.
10. 8  
Si le monde est un animal qui est, qui a été et qui sera toujours vivant, rien en lui n'est mortel. Chacune de ses parties est vivante; car dans un seul et même animal toujours vivant il n'y a pas de place pour la mort. Ainsi Dieu est rempli de vie et d'éternité, puisqu'il vit nécessairement toujours ; le soleil est éternel comme le monde, il gouverne à jamais les êtres vivants, il est la source et le distributeur de toute vitalité. Dieu est donc le gouverneur éternel de fout ce qui reçoit la vie et de tout ce qui la donne, le dispensateur éternel de la vie du monde. Or, il a dispensé une fois la vie à tous les vivants par une loi éternelle que je vais expliquer : Le mouvement du monde est la vie de l'éternité; le lieu où il se meut est l'éternité de la vie. Il ne s'arrêtera jamais ; il ne se corrompra jamais; la permanence de la vie éternelle l'entoure et le protège comme un rempart. Il dispense la vie à tout ce qui est en lui; il est le lien de tout ce qui est ordonné sous le soleil. L'effet de son mouvement est double; il est vivifié par l'éternité qui l'enveloppe, et il vivifie à son tour tout ce qu'il contient, diversifiant toutes choses selon des nombres et des temps fixes et déterminés. Par l'action du soleil et des étoiles, tout est classé dans le temps d'après une loi divine. Le temps terrestre se distingue par l'état de l'atmosphère, par les alternatives de chaleur et de froid; le temps céleste par les révolutions des astres qui reviennent périodiquement aux mêmes lieux. Le monde est le réceptacle du temps, dont la course et le mouvement entretiennent la vie. L'ordre et le temps produisent le renouvellement de tout ce qui est dans le monde, par des périodes alternées.


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Chapitre 10
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