Trois sages méditant erraient au bord des flots.
Le soir, tout empourpré de flamboyants sanglots,
Se laissait démembrer par les mains de l'abîme
Et sa chair de rayons ensanglantait les cimes.
L'un d'eux, dont l'oeil profond était plein de néant,
Etreignit l'univers sous son regard géant:
Il n'avait pu sentir, ce scrutateur énorme,
L'esprit d'un Dieu vibrer sous la fuite des formes
Et l'inutilité des choses l'accablait.
L'autre, sous le ciel d'or qui déjà s'étoilait,
Sous le sourire immense et magique des astres,
Rêveur malgré la vie entassant ses désastres
Mêlait son songe au choc étincelant des eaux.
Le troisième, à travers le mystique réseau
Des ombres s'enlaçant avec les transparences,
Semblait, rayon vainqueur, briser les apparences
Et porter, dans le monde infâme, le flambeau
Souverain de son clair et colossal cerveau.
Le regard d'un devin sous son sourcil d'augure.
Il émergeait du fond des cavernes obscures
Où d'âpres visions enivrèrent ses nuits.
Pendant que les oiseaux, perles évanouies,
Noyaient leur blanche forme au profond de l'espace
Ils parlèrent tous trois dans l'abîme rapace...
(François Brousse)
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