Patrimoine  Spirituel  de l'Humanité

La faveur de la cour de France


Voltaire : La faveur de la cour de France

Voltaire continue son œuvre tragique, à laquelle il croit beaucoup, et d'ailleurs fort appréciée. Si Muhammad est interdit à Paris en 1742, Mérope y est joué... et adulé. Enfin, profitant de l'ascension des frères d'Argenson en politique, Voltaire gagne la faveur de la cour de France, pour laquelle il écrit; il sera nommé historiographe du roi en 1745. Académicien et gentilhomme dès l'année suivante, il gâche tout en publiant Memnon, histoire orientale, puis le Monde comme il va et Zadig, dont Memnon est une première version: c'est la disgrâce.

Le rêve berlinois
La mort de Mme du Châtelet précipite son départ pour Berlin, où il tente, entre 1750 et 1752, de convaincre son bouillant ami éclairé, Frédéric II, de gouverner selon ses idées. Il y écrit Micromégas et le Siècle de Louis XIV, et commence le Dictionnaire philosophique. Mais le gouvernement se marie mal avec la philosophie tolérante, et sur l'ordre de Frédéric fait brûler un pamphlet de Voltaire contre Maupertuis. Il faut quitter Berlin, en mars 1753, connaître à nouveau l'état d'arrestation, en septembre, à Francfort et par Frédéric, puis se réfugier en Suisse, avec Mme Denis, sa maîtresse depuis 1745.

Ferney, centre de l'Europe des Lumières

Le tremblement de terre de Lisbonne (1755) et les débuts de la guerre de Sept Ans (1756) sont pour Voltaire la confirmation que le monde est soumis au mal. Il essaiera bien de jouer les diplomates en négociant une paix séparée entre la France et la Prusse, mais là n'est pas sa place. Le Poème sur le désastre de Lisbonne (1756), l'Essai sur l'histoire générale et sur les mœurs et l'esprit des nations (1756) et la rédaction de nouveaux contes, Jeannot et Colin (1764), l'Ingénu (1767), et surtout Candide ou l'Optimisme (1759) – dont la célèbre phrase «Il faut cultiver notre jardin» résume la leçon de sagesse – lui réussissent mieux. Attaque en règle contre les conduites des tristes calvinistes suisses, l'article «Genève» de l'Encyclopédie fait scandale. Voltaire est accusé de l'avoir inspiré à d'Alembert. Jean Jacques Rousseau lui envoie une lettre d'insultes en 1760, et il subit, au même titre que Diderot et d'Alembert, en France, une campagne sans précédent du front des antiphilosophes. Mais Voltaire est désormais invulnérable: en 1758, il a acquis Ferney, à cheval sur la frontière de la France et de la Suisse: il y a son jardin, d'où il surplombe le monde, se moque de ce qu'il veut, est visité par tous, et juge comme il lui plaît. De là aussi, il organise sa fortune, qui fait de lui l'écrivain le plus riche du siècle.

L'affaire Calas
Après avoir défendu un pasteur protestant condamné à mort, Voltaire lance, en 1762, l'affaire Calas: on avait trouvé, l'année précédente à Toulouse, Marc-Antoine Calas pendu dans son grenier. La rumeur publique assurait que ce jeune protestant, sur le point de se convertir au Catholicisme, avait été tué par son père, Jean Calas; celui-ci meurt sur la roue le 9 mars 1762. Voltaire, informé du procès, organise la défense posthume et veut la réhabilitation. Il trouve des partenaires protestants et libéraux qui l'aident dans cette entreprise, soulève l'opinion nationale et internationale et finit par faire réhabiliter Calas à Paris le 9 mars 1765, à l'unanimité. Dans le Traité sur la tolérance (1763), il soutient la thèse du suicide en travaillant sur le mobile du meurtre: un père peut-il tuer son fils pour l'empêcher de se convertir sans sombrer dans le fanatisme, or tout le monde convient que Calas n'est pas un fanatique. D'autre part, les preuves sur lesquelles les juges se sont appuyés sont fournies par les autorités religieuses, elles-mêmes fanatiques. On voit ici le combat essentiel de Voltaire: «écraser l'infâme», lutter de toutes ses forces contre l'intolérance au nom de la religion naturelle – l'écrivain est déiste, ou théiste.


  
  
  



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