Patrimoine  Spirituel  de l'Humanité

Intelligence et intuition


Henri Bergson : Intelligence et intuition

À la distinction des deux mémoires répond l'opposition entre l'action et la connaissance, à quoi correspondent l'intelligence et l'intuition.

Impuissante à nous faire connaître le réel et la continuité du devenir, l'intelligence est active, «faculté de fabriquer des outils à faire des outils» (l'Évolution créatrice, 1907), non contemplative: l'homme est faber avant d'être sapiens. Elle est aux hommes ce que l'instinct est aux animaux: une forme d'adaptation au réel. Simplement, l'homme a des outils plus puissants que ceux des animaux: le langage, qui opère des classifications rigides, les mots n'étant que des «étiquettes sur les choses»; la science, qui permet de prévoir et d'organiser l'action en appliquant à la matière des procédés de calcul et de mesure.

Seule l'intuition va au cœur du réel et permet de connaître le temps véritable qu'est la durée intérieure. C'est «la connaissance directe de l'esprit par l'esprit» au-delà de la médiation du langage incapable de saisir le «moi fondamental».

L'élan vital
L'intuition est aussi la connaissance de la durée de l'univers et du grand souffle de la vie. Tel est l'enseignement de l'Evolution créatrice (1907). Il n'y a pas que la conscience qui dure. L'univers matériel, les choses ont aussi une durée propre, que l'on peut constater en considérant le temps qu'un morceau de sucre met à fondre dans un verre d'eau: ce n'est pas seulement du temps quantitatif, spatialisé, mesurable, c'est aussi ma propre durée interne tandis que j'attends que le sucre fonde. La durée constitue ainsi la substance de notre être et de toute chose. Son essence spirituelle fait que l'on qualifiera la philosophie bergsonienne de «pan-spiritualisme». Mais on dira aussi qu'elle est vitaliste, au sens où, fondamentalement, c'est la vie qui dure: «Partout où quelque chose vit, il y a, ouvert quelque part, un registre où le temps s'inscrit.» Or, la vie ne peut se comprendre en termes physico-chimiques et Henri Bergson récusera à la fois le mécanisme de Darwin et le finalisme de Leibniz en ce qu'ils mettent, diversement, le temps entre parenthèses. Au contraire, l'intuition saisit l'élan vital qui pousse la matière à l'évolution et s'exprime dans l'énergie spirituelle de l'homme. La vie est un mouvement créateur et un effort pour remonter la pente que descend la matière.


  
  
  


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